Le livre de Frog – janvier 2015 : Tout-monde, proposé par Benoît Gilles

Le Livre de Frog, janvier 2015. Entretien avec Benoit Gilles autour de Tout-monde, roman déconcertant et exigeant de l’écrivain, poète et essayiste martiniquais Édouard Glissant publié en 1993.

 

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Le livre et l’invité du mois:

thumbs_benoit_light-2Rédacteur en chef du quotidien d’information locale en ligne Marsactu, journaliste à Marseille depuis près de 10 ans (Le Pavé, Le Ravi, La Marseillaise, etc.), Benoît Gilles nous a proposé de partir à la découverte de Tout-monde, roman déconcertant et exigeant d’Edouard Glissant publié en 1993 aux éditions Gallimard.

 

415hWC2WL-L._SY344_BO1,204,203,200_Entrelacement de narrations, de discours, de genres, d’espaces, de temps, Tout-monde est un roman et plus que ça : il est la porte d’entrée d’une œuvre et l’illustration d’une pensée, celle d’un auteur martiniquais qui, en donnant une place magistrale aux voix des îles antillaises, propose à travers elles une vision complexe, chaotique mais extrêmement féconde d’un monde tout à la fois un et multiple. Une vision qui permet à Edouard Glissant de développer et d’illustrer des concepts phares tels que celui de la Relation, de la mondialité ou de la créolisation, qui font de son œuvre littéraire et théorique une matière extrêmement riche pour (re)penser la réalité la plus actuelle de nos sociétés contemporaines.

 

Les extraits du mois :

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Francisco, figure de la chanson martiniquaise, repris au Japon.

L’un des concepts phares d’Edouard Glissant est celui de créolisation, que l’écrivain développe pour désigner le processus inattendu et imprévisible qui se produit lors de la mise en contact de plusieurs cultures dans le monde. Nous avons voulu écouter, afin de souligner et d’illustrer l’actualité de ce concept et de la pensée de Glissant, une reprise d’une chanson créole Fanm Matinik Dou (Femmes Martinique doux)  de la grande figure martiniquaise Frantz Charles, plus connu sous le nom de Francisco, décédé en 2013 à l’âge de 80 ans. Maya, une jeune artiste japonaise, a en effet interprété cette chanson en 2009 dans une version remaniée aux accents jazzy… Rencontre des cultures inattendue et imprévisible, vous disait-on.

 

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Patrick Chamoiseau, continuateur de la pensée de Glissant.

Décédé en 2011, Edouard Glissant a laissé au monde une véritable poétique embrassant des préoccupations et réflexions tant philosophiques que sociologiques, économiques ou encore anthropologiques… Il n’est donc pas pas étonnant que sa pensée ait connu – et connaît toujours – une grande influence, tant en Martinique que dans le reste monde, tant dans le domaine culturel qu’intellectuel. Voilà pourquoi nous nous sommes intéressés à un autre auteur martiniquais, Patrick Chamoiseau, qui a travaillé et même publié avec Edouard Glissant L’intraitable beauté du monde, adresse à Barack Obama (Editions Galaade, 2009). Dans l’extrait que nous avons écouté, l’auteur de Texaco, prix Goncourt 2012, nous explique ce qu’il faut entendre par le « Tout-monde ». Un moyen pour nous de faire le point sur cette notion avant d’aborder avec notre invité l’héritage et l’influence de la pensée d’Edouard Glissant aujourd’hui.

 

La chronique et les conseils du mois après notre passage à la librairie Maupetit :

  • Meursault contre-enquête, de Kamel Daoud (Actes Sud, 2014) : Prix des cinq continents de la francophonie 2014, Prix François Mauriac 2014, finaliste du Prix Goncourt 2014, Meursault contre-enquête est l’histoire du meurtre de « l’Arabe » tué par Meursault dans L’étranger de Camus raconté soixante-dix ans après les faits par le frère de la victime.
  • Anima, de Wajdi Mouawad (Babel, 2014) : un homme se lance sur les traces du meurtrier de sa femme, sauvagement assassinée.  La polyphonie est une nouvelle fois à l’honneur dans cette enquête qui nous est racontée du point de vue de divers… Animaux.
  • Silo, de Hugh Howey (Babel, 2014) : roman qui inaugure la branche « science fiction » de la collection de poche d’Actes Sud Babel : « Dans un futur indéterminé, des survivants vivent depuis plusieurs générations dans un immense silo creusé dans la terre, à l’abri d’une atmosphère devenue toxique. Seul un immense écran relayant les images filmées par des caméras les relie au monde extérieur. Lorsque cette société bannit l’un des siens, il est envoyé dehors, vers une mort certaine, et pourtant, tous sans exception vont, avant de mourir, nettoyer les capteurs des caméras. Pourquoi ? »