Souffles. Espoirs de révolution au Maroc

1er-couv-SoufflesLa revue Souffles – 1966-1973, Espoirs de révolution culturelle au Maroc. Un ouvrage de Kenza SEFRIOUI, publié aux éditions du Sirocco.

« Vois-tu, nous avons d’abord bâti dans du sable, le vent a emporté le sable. Puis nous avons bâti dans du roc, la foudre a brisé le roc. Il faut qu’on pense sérieusement à bâtir, dans l’homme. » Ahmed Bouanani, « Mon Pays », in le recueil Les Persiennes.

entretien avec Kenza Sefrioui à propos de la revue Souffles

Créée à Rabat en mars 1966 par un petit groupe de jeunes poètes d’expression française, la revue Souffles a été, de 1966 à 1973, une tribune singulière dans le paysage de la presse marocaine, en évoluant du laboratoire d’écriture à l’engagement culturel et politique. Elle a porté un véritable mouvement littéraire et intellectuel, avant de devenir la tribune du mouvement marxiste-léniniste. Disparue en 1972, après l’arrestation d’Abdellatif Laâbi et d’Abraham Serfati, son histoire, retracée au travers des textes et des témoignages de ses contributeurs, montre que sa vision moderniste et progressiste invitait à des questionnements toujours d’actualité.

« … cette revue, qui aurait pu vivre la vie tranquille d’un cénacle de poètes et d’artistes… a réussi, elle, en une série d’avancées de la conscience, à opérer deux ruptures essentielles : l’une dans le champ culturel et esthétique, l’autre dans le champ politique… »
Abdellatif Laâbi (Extrait de la préface)

Kenza SEFRIOUI est journaliste et critique littéraire.
De sa thèse de doctorat en littérature comparée consacrée à Souffles, donne aujourd’hui une étude rigoureuse en même temps qu’un récit passionnant qui plonge le lecteur au cœur de la revue et de ses engagements « ardents ».

Une émission proposée par Emmanuel Moreira

+ loin :

Revue souffles en ligne sur le site de la bibliothèque nationale du Maroc

Réseau Racines

« Bonne année camarades
c’est le moment des bilans
on ne demande pas de statistiques

(…)
où en sommes-nous terre de contrastes
(…)
la ruée vers le soleil
cailloux-palmiers-serpents indigènes
joli-coussin-bijou-burnous berbères c’est plus authentique
à répression ouverte
un bazar de 500.000 km2
fiche anthropométrique
casier judiciaire
les mercenaires aux quatre coins des rues
nos peuples terrassés par giclées de féodalités petites exploiteuses
le silence est de rigueur

voilà voilà voilà on ne mange pas assez on ne travaille pas on ne
comprend pas on ne parle pas on ne baise pas on ne vit pas
– au secours
– pour qui la première balle?
chut chut t’occupe pas

(…Pause…)

spectateurs
n’acceptez pas le silence
chacun s’impose son silence
N’EST PAS HOMME CELUI QUI ACCEPTE LE SILENCE
cadavres cadavres
derricks
minarets de cadavres
candidats au suicide quotidien
vous vous suicidez chaque jour en acceptant le silence
vous raidissez
cadavérisez
jaunissez
chaque jour en clouant vos
glottes et vos poings
chaque assemblée est une manifestation
sinon c’est un cimetière
je vous le dis
L’HOMME PARLERA
SON RÈGNE ARRIVERA »

Abdellatif Lâabi, extrait de »Mobilisation-tract », in Souffles, numéros 13 et 14, 1er et 2e trimestre 1969.