La Baguette Magique est une parfaite illustration de journalisme citoyen. Ce journal crée par des habitantes de la cité de la Castellane s’éloigne du schéma classique qui part de la source au public, en passant par la plume du journaliste, mais invite à la réflexion.
A l’échelle du quartier d’abord. Les 150 exemplaires du premier numéro se sont écoulés en une après-midi à la Castellane. Le deuxième numéro a été présenté le 17 mars au centre social et s’exportera sur certains événements en dehors du quartier. Il est également téléchargeable en version PDF sur le site de 3,2,1, l’association porteuse du projet. La prochaine présentation se fera le 29 Mai à 18h à la galerie ARTOPASS à Marseille (dans le cinquième arrondissement au 32 rue de Bruys).
Les jeunes journalistes citoyens du projet Labomed se sont réunis pour leur premier atelier il y a bientôt deux mois, vendredi 13 mars dernier. Sous la houlette de Caroline Donati (New Syrian Voices) et de Rafika Bendermel (Tunisie Bondy Blog), ils sont parti documenter l’action de la Baguette Magique. Retour et réflexion sur cette journée.
Vidéo de Lina Trabelsi
Vers 11h – Préparatifs à la Friche la Belle de Mai 
Discussion sur l’image du quartier de la Castellane. Nous -jeunes journalistes de Labomed- sommes mis en garde par les journalistes professionnels sur la nécessité de ne pas s’attendre à trouver des faits en particulier. Rafika explique à la communauté Labomed que, pour elle, les médias français n’ont pas la même grille d’analyse lorsque l’actualité concerne les banlieues. Et une appétence pour des critères particuliers (voitures brulées, drogue etc.). Au même titre que « société », « politique », « culture »… « banlieue » est une rubrique à part entière. Sans chercher ce qu’il y a derrière. « Lorsque les journalistes se rendent sur le terrain, en journée, en semaine, qui rencontrent-ils ? Des chômeurs. Alors qu’une majorité, invisible, travaille. »
Vers 14h30 – Centre social et culturel La Castellane
A la sorti du bus des jeunes nous interpellent de loin. « Eh les journalistes, vous voulez quelque chose à filmer ? ». Pour le coup on a inconsciemment cherché cette remarque. Dix-huit personnes qui découvrent le quartier en regardant dans tous les sens, appareils photos autour du coup et caméras en main; vus de l’extérieur, on est surement les parfaits journalistes en visite au zoo blâmés par IAM. Si cela relève d’une maladresse de notre part, le récent coup de projecteur des médias nationaux (entre autres TF1,France 2, ou Libération) sur le quartier à laissé des traces . Lorsque nous en discutons avec l’équipe de la Baguette Magique, l’une des rédactrices s’exprime plus que les autres. Elle rebondit énergiquement, les bras croisés, à certaines de nos interventions.
« On est bien ici, on est très bien »
Derrière cette façade, on sent que la fierté du « village » a été touché. « Il y a une chaleur et un amour incroyable dans ce quartier. Quand j’ai eu un drame dans ma vie, c’est mes voisins que j’ai trouvés en premiers. C’est pas à cause d’une minorité que les autres doivent payer » défend-elle. L’image de la Castellane relayée par les médias met ses habitantes dans une position inconfortable. Ce qui entraîne des répercussions au niveau de l’emploi, comme nous le verrons dans un prochain article.
« Quand je vois ça, je me dis que je suis pas allée à l’école pour rien ». Plutôt que de laisser l’image de leur quartier leur échapper, ces habitantes de La Castellane ont investis le champ de l’information en s’appuyant sur leurs capacités. « T’y as vu on dirait pas un journal qu’on achète !? ».
Il s’adresse à qui ce journal La Baguette Magique?
Vers 18h – Villa Méditerranée
Débrief instructif entre Labo Méditerranéens. On discute de nos erreurs et de nos ressentis sur cet après-midi. On pointe des choses qui relèvent de la déontologie. Par exemple, enregistrer une conversation sans prévenir est une technique à bannir. Même pour débrider un discours en se libérant du poids de la technologie. « Imagines que tu as un carnet à ce moment là. C’est comme si tu notes ce que te dis une personne alors qu’elle croit que tu l’écoutes seulement » .C’est la même chose lorsqu’il s’agit d’utiliser une partie d’interview faite par un collègue qui a dit à l’interviewé qu’il ne la diffuserait pas. D’autres remarques viennent élargir nos perspectives sur cette journée, riche humainement et en enseignements.
