La rencontre entre l’équipe de LaboMed et le groupe de La Baguette Magique est l’occasion de s’intéresser à l’emploi des jeunes avec des femmes qui sont le plus souvent des mamans porteuses d’espoirs et d’inquiétudes pour l’avenir de leurs enfants.

La Castellane est un quartier qui a été créé au tournant des années 60 et 70 pour répondre dans l’urgence pour loger les travailleurs de la période des Trente Glorieuse. Jusqu’à la fin des années quatre-vingt les habitants de la Castellane sont recrutés dans les usines alentour ou sur le port de Marseille. L’essoufflement de la croissance économique transforme la cité à mesure que le bassin industriel se dégrade. En 2010, 47% des actifs de la Castellane étaient au chômage. Hayet, qui réside depuis 21 ans dans le quartier a connu ces changements mais ne se montre pas fataliste car des chemins existent pour s’en sortir et qu’au-delà du cas emblématique de Zinedine Zidane, les jeunes peuvent trouver leur voie. Hayet explique qu’à la Castellane « On a des futurs médecins, des futurs dentistes, des sportifs, des secrétaires, des futurs avocats, des futurs ingénieurs » et prend pour témoin le parcours de ses enfants qui étudient ou travaillent.

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Mais La Castellane, à l’instar d’autres quartiers comme les Minguettes à Lyon, bénéficie d’une image dégradée par des années de couverture médiatique et de regard institutionnel négatifs. La réputation du quartier a des répercussions dramatiques dans le quotidien de ses habitants. Dire que l’on vient de la Castellane s’est être associé à un ensemble d’images négatives. Les femmes de l’équipe de la Castellane témoignent de ce sentiment d’être piégé par le quartier. Hayet affirme que les jeunes sont discriminés par ce stigmate de l’adresse « On a tellement stigmatisé la Castellane que maintenant quand les jeunes marquent sur un CV « Cité la Castellane », c’est non, même pas la peine de regarder le CV ». Le problème est si connu que « Même des professeurs au lycée conseillent aux élèves de ne pas mettre la Castellane » comme l’explique Stéphanie qui travaille au Centre Social, « Pour certaines personnes c’est un peu violent ».

Conscientes que l’image qui est véhiculé par le quartier ne correspond pas à ce qu’elles vivent, le groupe de la Baguette Magique se réunit pour partager leur vécu avec les habitants extérieurs à la cité. Ces habitantes se rencontrent pour partager une aventure humaine et collective à l’échelle de leur quartier mais elles souhaitent également s’ouvrir aux autres. Elles veulent donner et recevoir. Hayet insiste sur le sens de cette démarche « Le quartier est riche dans l’humanité, ce n’est pas la richesse monétaire, on est riche de nous-même et on veut le montrer à tout le monde et recevoir la richesse de l’extérieur ». Elle affirme également que «Grâce au journal, on montre qu’il y a de la lumière, il y a du concret et on peut montrer que dans la cité il y a des jeunes qui sont diplômés, qui bataillent pour montrer qu’ils sont capables. »

Le centre social de la Castellane s’investi depuis une dizaine d’années dans cette thématique de l’emploi car les demandes des habitants sont de plus en plus nombreuses, Nathalie explique que « le centre est sollicité par les habitants sur les démarches à entreprendre. Parce que le repère aux différentes administrations était compliqué pour eux, on s’est mis à faire un accompagnement vers l’insertion professionnelle ». Pour aider au mieux les habitants de la Castellane, deux chargés de projet travaillent sur l’insertion en lien avec la Mission Locale et Pôle emploi. Par des ateliers collectifs, des simulations d’entretien, le personnel du centre social s’efforce de donner plus de confiance aux habitants pour s’imposer sur le marché du travail et pour compenser le manque de formation des jeunes qui sont sortis parfois très tôt du système scolaire.

Malgré la création de zones franches qui permettent la suppression pour une durée de cinq ans de la taxe professionnelle et des charges sociales des entreprises qui s’installent à l’intérieur de ces secteurs, les emplois disponibles restent insuffisants. D’un côté, les entreprises qui s’y installent n’emploient pas forcément les jeunes du quartier. D’autre part les contrats sont souvent précaires et ne permettent pas aux jeunes de s’émanciper vraiment par le travail. Par exemple lors de l’ouverture du magasin de vêtements Primark au Grand Littoral, le centre social a fonctionné comme un relai pour permettre certaines embauches mais pour Stéphanie « La difficulté est que ce sont souvent des contrats précaires et des contrats avec un petit volume d’heures et les jeunes ont envie de travailler plus de 20 heures par semaine ».

Francesca (de l’association 3.2.1) et Hayet présentent leur Baguette Magique#2

Si la Castellane doit bénéficier d’une rénovation urbaine dans un futur proche, les questions d’accès à l’emploi devront impérativement faire partie de la réflexion des acteurs de la transformation du quartier pour permettre à la cité de sortir de ses difficultés. Les « femmes de la Casté » ne s’y trompent pas en se demandant dans leur Baguette Magique « Pourquoi ne pas créer un centre de formation polyvalent pour nos jeunes, où ils puissent apprendre, expérimenter, mûrir leurs passions et les transformer en emploi ? ». Reste à savoir si les acteurs du renouvellement urbain entendront le message de La Baguette Magique.