Le 13h30 c’est le rendez-vous irrégulier, mais toujours à la même heure, en direct du studio de Grenouille. Une occasion de rencontrer des paroles inventives ou engagées, réfléchies ou spontanées. Cette semaine, Emmanuel Moreira s’est entretenu avec Flore Murard-Yoanovitch et Letizia Gallo sur la tragédie des naufrages des migrants en Méditerranée.
La Méditerranée serait-elle devenue la fosse commune de l’Europe ? Europe forteresse, indifférente à la mort, lorsque celle-ci n’atteint pas son centre.
Il y a bien quelques voix pour dire l’horreur, pour vouloir une autre politique. L’hospitalité inconditionnelle.
Mais, l’Europe forteresse est celle des coeurs endurcis et sans amour. Elle a pour politique et la guerre et la peur.
Reste les habitants de Lampedusa seuls a tendre la main.
3 octobre 2013 : Naufrage d’une embarcation transportant 500 migrants près de Lampedusa dans la mer Méditerranée. 366 morts.
Décembre 2014: Mare Nostrum, l’opération italienne de sauvetage déclenchée après ce naufrage est interrompue.
12 avril 2015 : Naufrage d’une embarcation transportant des migrants en mer Méditerranée. 400 morts.
19 avril 2015 : Naufrage d’une embarcation transportant environ 800 migrants à environ 110 km des côtes libyennes. Plus de 700 morts.
Flore Murard-Yovanovitch est journaliste à Rome, elle est engagée dans le Comité Vérité et Justice des Migrants Disparus dans la Méditerranée.
Letizia Gallo a co-réalisé le film Mare Magnun avec Ester Sparatore, un documentaire tourné pendant les élections municipales de Lampedusa au printemps 2012. Ces élections se sont terminées par la victoire de Giusi Nicolini, la candidate qui disait aux habitants de l’île qu’ils doivent envisager leur avenir avec celui des migrants qui échouent, morts ou vivants, sur leurs plages. Que leurs destins sont indéfectiblement liés et qu’il est illusoire de penser pouvoir s’en « protéger » en érigeant des murs et des camps pour les garder à l’écart de la ville.
Quelques pistes de réflexions:
– La prière laïque «Mare nostro che non sei nei cieli» du poête italien Erri De Luca:
« Mare nostro che non sei nei cieli
e abbracci i confini dell’isola
e del mondo col tuo sale,
sia benedetto il tuo fondale,
accogli le gremite imbarcazioni
senza una strada sopra le tue onde
i pescatori usciti nella notte,
le loro reti tra le tue creature,
che tornano al mattino con la pesca
dei naufraghi salvati.
Mare nostro che non sei nei cieli,
all’alba sei colore del frumento
al tramonto dell’uva e di vendemmia.
ti abbiamo seminato di annegati più di
qualunque età delle tempeste.
Mare Nostro che non sei nei cieli,
tu sei più giusto della terraferma
pure quando sollevi onde a muraglia
poi le abbassi a tappeto.
Custodisci le vite, le visite,
come foglie sul viale,
fai da autunno per loro,
da carezza, abbraccio, bacio in fronte,
madre, padre prima di partire »
– L’association Marseillaise Les Instants vidéo, concentrée autour des arts numériques et poétiques, dénonçait dans un récent communiqué « un crime organisé puisque l’Europe ferme ses frontières et finance l’opération ‘Triton’ uniquement conçue pour surveiller les frontières et non pas pour sauver des vies humaines ».
Crédits photo: Antonio Parinello et Vigili del Fuoco (Reuters)