Avec 1993 de Julien Gosselin et Aurélien Bellanger, on aura éprouvé les limites d’un monde d’abord donné sans limites. Ce monde où le ciel n’est plus assez profond et où les montagnes ne sont plus assez hautes. Puis, on aura éprouvé les limites d’un monde achevé, totalement relié ayant aboli et la géographie et l’Histoire. Un monde, qui célèbre chaque jour sa victoire dans ses infrastructures, où la science seule, aura hérité de l’idée du progrès. Où seule l’économie gouverne. Dans ce monde, l’humain est de trop. Un monde parfait, fluide et circulaire. Le monde des démocraties libérales et de l’Union Européenne. Ici l’Europe à pour nom Eurodance. Parce qu’on y dance terriblement, intensément. Parce que la défonce et la baise sont les lots de consolation des enfants de l’Union. On aura été dans la nuit de l’Europe, là où elle nourri l’ultime guerre à venir. La guerre de l’Europe contre-elle même, contre son projet, contre son esprit. On aura été dans la nuit et, on aura vu une jeunesse fomenter son désir de destruction. On aura vu une jeunesse fasciste prête à se conduire elle, et son monde, dans un désastre plus grand encore. On aura lu que ces enfants de l’Union répondent à un programme > Erasmus.
Erasmus est ce par quoi l’Union Européenne engendre ces enfants-objet.

On aura été aux limites de la nuit et on aura vu le visage triste, le visage vide, des enfants d’Erasmus. Ultime image sans profondeur, juste infiniment vide. Une vision, qui aura durée quelques instants, qu’il ne faudrait jamais pouvoir voir, et que pourtant il nous faut voir, en face, une fois. Une vérité à peine supportable. Car la vérité n’a pas à faire du bien ni du mal, elle est. Et, si elle est si difficilement supportable, c’est que nous y résistons. Et nous aurons résister à cette vision, à sa venu. Et c’est aussi que cette vérité n’est pas belle à voir, que ce vide, ce retrait de la vie à même la vie, est une image de la mort.

Devant une telle image on ne peut que faire demi-tour, mais cette fois-ci défait, honteux, sans résistance aucune, regardant autour de soi un paysage de ruines, portant les vestiges d’une guerre lointaine, un monde post-apocalyptique ou l’humanité n’est plus que sous le registre de son absence.


par Emmanuel Moreira