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Mon voyage dans le travail de Hofesh Schechter commence dans le noir. Il n’y aura pas beaucoup de lumière dans les pièces, tout est joué dans la pénombre, le clair-obscur, l’assombrissement. Le jeu de lumières nous amène à percevoir tantôt un espace fermé (l’intérieur d’une chambre), tantôt un espace de la ville, une rue illuminée par des lampadaires par exemple (Fragments). C’est une espèce de non-lieu qui se dégage, surtout dans Disappearing Act, où « chaos, insurrection, devenir » (selon le programme du chorégraphe) sont libres de surgir. L’expérience de la lumière, si elle se donne avec parcimonie, est le contre poids d’une présence importante de la musique, qui est un élément chorégraphique à part entière. Composée par Schechter lui-même, elle se joue sur la répétition, l’emboitement des rythmes, la puissance des percussions, et le mouvement suit, en solo ou en groupe. Je ne connaissait pas Schechter, et sa première pièce m’est apparue d’une vitesse extrême : dans Cult cela se somme à la précision du geste, à la frénésie des actions des danseurs qui semblent contrôlés par un maitre. Une sorte de travail à la chaine se dégage, ils ne sont pas libres, ils doivent se comporter ainsi. C’est une pièce politique en quelque sorte, la plus agressive mais qui révèle sans intermédiaires la nature esthétique de Schechter. On enchaine avec Fragments, histoire d’une intimité de couple, et c’est un clin d’œil au cinéma : on rit, il y a de la tendresse. « Always look at the bright side of life » – et qui n’a pas pensé aux Monty Python à ce moment là?.
Si les deux premières pièces nous racontent deux histoires, Disappearing Act arrive avec force esthétique, nous frappe pour la beauté des danseurs qui, avec leur costumes légèrement sixties, nous entrainent dans une pièce riche de mystère. La lumière encore fait le tout, on dirait qu’elle est filtrée par des fenêtres ouvertes, la musique est hypnotisante, les gestes précis et de plus en plus envoutants…c’est le désordre organisé, comme dans un rituel. Une découverte pour moi, ce spectacle d’une grande beauté esthétique repose sur la grande bravoure des danseurs, jeunes et puissants, et sur le regard sophistiqué de Schechter.

Luigia Parlati

Hofesh Shechter
Cult / Fragments / Disappearing Act
jeu 25 juin, 21 h
La Criée, Théâtre national de Marseille